J’ai une faiblesse pour Michel Houellebeck. Tout d’abord et c’est très important, parce qu’il écrit remarquablement bien. C’est un lieu commun d’écrire cela puisque tout le monde s’accorde à le dire. Il évoque souvent, la plupart du temps, des sujets difficiles, voire douloureux, dont il parle sans faux semblants, avec une franchise et un aplomb qui font souvent cruellement défaut chez les auteurs contemporains, de cela je lui suis reconnaissante. Ses écrits sont parfois un peu rébarbatifs et souvent complètement déprimants. Les sujets qu’il traite en sont en grande partie la cause, j’ai particulièrement aimé “La carte et le territoire” et ” Soumission” qui semblent être ses oeuvres les plus accessibles. C’est donc avec envie et curiosité que j’ai acquis son dernier roman “Sérotonine”.

… certains sociologues de peu d’intelligence prétendaient distinguer de nouvelles tribus dans les “famille recomposées”, c’était bien possible, mais des familles recomposées pour ma part je n’en avais jamais vu, des familles décomposées oui, je n’avais même à peu près vu que ça, hormis bien sûr les cas d’ailleurs nombreux où le processus de décomposition intervenait déjà au stade du couple, avant la production d’enfants. Quant au processus de recomposition, je n’avais pas eu l’occasion de le voir à l’oeuvre, ” Quand notre coeur a fait une fois sa vendange / Vivre est un mal ” écrivait plus justement Beaudelaire, cette histoire de familles recomposées n’était à mon avis qu’une dégoûtante foutaise, quand bien même il ne s’agissait pas d’une propagande pure, optimiste et postmoderne, décalée, dédiée aux CSP+ et CSP++, inaudible au-delà de la porte de Charenton. Michel Houellebeck.
Ce roman à mon avis se divise en trois parties. L’histoire commence en Espagne par la rencontre du personnage principal et quasiment unique avec deux charmantes espagnoles, début sympathique et léger qui de la part d’Houellebeck laisse augurer d’une suite plus sombre, ça ne manque pas, très rapidement il nous parle  d’une fin de relation pénible avec son actuelle compagne dont visiblement il ne sait pas comment se débarrasser, c’est l’élément déclencheur de la dégringolade. Il revient sur ses amours passées que cette relation désastreuse lui fait regretter, jusqu’ici tout va bien, le récit est plutôt distrayant, à part cette manie de raconter sa vie sexuelle à tout bout de champ, en des termes qui évoquent plus l’accouplement des termites du moyen Congo qu’une scène érotique, mais soit c’est son dada, on lui pardonne. Par contre je suis restée interdite et baillante sur la deuxième partie du livre qui  encore une fois ressasse ses souvenirs de  relations amoureuses de jeunesse. La troisième partie par contre vaut le coup de poursuivre jusque là. Le récit d’une révolte paysanne prouve, si c’était encore nécessaire, à quel point Michel Houellebeck est en phase avec les drames que met en oeuvre notre société et son cynisme toujours renouvelé. Son empathie  pour les révoltés nous permet de ressentir cet état de désespérance dans lequel on peut se demander si nous n’allons pas tous sombrer, c’est un moment très fort du récit. On ressort de cette lecture, avec ce sentiment d’avoir lu un écrivain qui a énormément à nous dire sur nous-même et ce qu’il nous dit est parfois désespérant.

CS;)

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